Initiée en 2020, l’exposition Science/Fiction — Une non-histoire des Plantes propose de retracer une histoire visuelle des plantes reliant l’art, la technologie et la science du XIXe siècle à nos jours. Réunissant plus de 40 artistes de différentes époques et nationalités, cette exposition met en regard des œuvres photographiques historiques telles que les cyanotypes d’Anna Atkins, l’inventaire des formes végétales de Karl Blossfeldt ou encore les expérimentations au microscope de Laure Albin-Guillot avec des créations d’artistes contemporain·es comme Sam Falls, Pierre Joseph, Jochen Lempert, Angelica Mesiti ou encore Agnieszka Polska.
Conçue en six chapitres, cette exposition emprunte sa construction au roman de science-fiction : débutant sur l’idée d’un monde stable et identifiable, elle plonge progressivement dans des paysages incertains et inattendus. Les deux premiers chapitres intitulés respectivement « L’agentivité des plantes » et « Symbiose & contamination » sont consacrés à des approches dites objectives, liées à la science. Les quatre autres chapitres, dénommés « Au- delà du réel », « Les plantes vous observent », « Les plantes comme fiction politique » et « Fiction(s) spéculative(s) » abordent les accointances entre la science et la science-fiction, deux domaines qui ont fait de la flore un terrain d’expérimentation. Dépassant les clivages normatifs entre fiction et réalité, science et art, les artistes présent·es dans cette exposition s’affranchissent des catégories figées afin de capturer la complexité de la vie des plantes et de nos rapports aux êtres végétaux. Cette exposition est l’occasion de plonger au cœur de la relation privilégiée qu’entretiennent la photographie et la vidéographie avec les plantes, deux techniques de captation de l’image dont l’utilisation première fut mise au service de la recherche scientifique. Paradoxalement, tout en s’interposant entre nous et le monde naturel, ces procédés photographiques et cinématographiques, au lieu de créer une distance, ont mis en lumière la subjectivité, l’intelligence et les capacités expressives des plantes, en palliant notre « myopie anthropocentriste ».
En interrogeant les projections et les représentations humaines des plantes, cette exposition intègre des narrations issues de la science et de la science- fiction comme un moyen de fabriquer de nouveaux imaginaires. Les récits proposés, non centrés sur l’idée de progrès et de modernité, pensent avec les limites planétaires. Ces histoires émancipatrices, dépassant une vision anthropocentrique du monde, donnent aux plantes une place et une voix. Elles deviennent ainsi un espace de réparation de notre lien au monde végétal. Pour penser les mutations écologiques, il est nécessaire de prendre en considération le pouvoir politique de l’imaginaire, d’accepter nos espoirs et d’explorer nos peurs les plus intimes, afin de poursuivre ensemble l’écriture d’un futur commun.