A l’occasion de la sortie du livre L’instant Expressif consacré au travail photographique de Jérémie Nassif, publié aux éditions du Regard en février, une exposition intitulée Voltige aura lieu à la galerie Sit Down du 12 février au 26 mars et dans un format monumental sur les façades du mk2 Bibliothèque du 10 février au 16 mars. Représentation d’artistes dans leur travail quotidien, Voltige tente de dévoiler le mécanisme d’élaboration de mouvements pour en chemin révéler leurs émotions. (suite…)
Depuis « Sasha », la série qu’elle avait consacrée à sa fille et au passage de l’enfant à l’adolescente, puis à la jeune fille, sur un mode intimiste et onirique, proche du conte de fées, Claudine Doury ne cesse de questionner cet entre-deux de l’âge, du corps et du temps, à la fois fragile et violent, qu’est l’adolescence.
Mais si, jusqu’alors, l’homme n’apparaissait, fugitivement, que comme un figurant dans ses images, il advient au coeur même de « L’Homme nouveau », série entièrement réalisée au sein de St Petersbourg. On verra un double écho à ce titre : à l’impératif révolutionnaire du bolchévisme, bien sûr, mais aussi à ce moment de mue et de mutation où l’adolescent éclot en homme.
Entre-deux, passage d’une frontière, métamorphose ovidienne : c’est ce moment si singulier, unique, de crise et d’avènement à soi, que l’artiste s’obstine à capter, à décrypter.
Ce faisant, elle questionne ce qu’il en est de l’identité masculine – qu’est-ce que devenir un homme ? Et un homme dans une Russie elle-même en pleine mutation, qui n’a plus rien à voir avec l’URSS de la guerre froide et des rideaux de fer ? – mais aussi, et plus radicalement peut-être, se positionne comme une femme qui ose, enfin, regarder les hommes. (suite…)
J’ai grandi dans le petit état du Vermont, à la campagne, au nord-est des Etats-Unis. Un raccourci du français vert de montagne, il s’agit d’un endroit réputé pour ses très belles terres agricoles, sa forêt luxuriante et ses villes pittoresques. Chacun a coutume de se pâmer devant cet Etat que l’on trouve magnifique car il apparaît tel que dans le passé. Nombre de ses vieilles maisons et anciennes granges ont été joliment restaurées et retrouvé leur aspect d’origine. La nostalgie est célébrée avec une idéalisation du 19ème siècle liée à l’époque coloniale et ses idéaux agraires en matière de propriété et nationalisme. Je ne suis pas sûr qu’aucun d’entre nous aurait aimé vivre dans une ferme au 19ème siècle, avec quelques moutons broutant sur des sols rocailleux, froids et déboisés. C’est pourquoi le terme nostalgie s’applique parfaitement à cet Etat : la vérité est arrangée afin de nous apparaître plus agréable. Oui, je suis complice de tout cela. Ma famille a emménagé dans cet Etat afin d’y exploiter une ferme dans les années soixante-dix. Certes, c’était assez fantastique de grandir dans cet environnement, il ne s’agissait pas de casser de la roche ou de s’occuper de la traite de minuit. Ce récit arrangé s’appuie en effet sur de bonnes raisons. L’Etat a besoin de revenus, l’histoire apporte du répit et du réconfort, particulièrement aux visiteurs et l’on a pris l’habitude de croire en ce récit. Ainsi, j’ai pris moi aussi l’habitude de ce retour en arrière toujours sélectif – la vie en rose. (suite…)
C’est une étrange galerie de portraits que nous propose Olivier Culmann.
L’homme indien défile devant nos yeux, sans pour autant dévoiler son identité réelle…
Amorcée entre 2009 et 2011, années au cours desquelles Olivier Culmann vit à Delhi, puis poursuivie jusqu’en 2013, la série The Others sera présentée pour la première fois dans son intégralité lors de cette exposition au musée Nicéphore Niépce. Avec plus de 130 oeuvres, le photographe questionne l’élaboration du statut social à travers la construction de l’image de soi et explore les limites du médium photographique. (suite…)
Tom Wood : à l’affut du paysage
Après 30 ans passés à documenter l’Angleterre urbaine de Liverpool et du Merseyside, le maitre de la photographie d’outre-Manche se tourne vers le temps suspendu des paysages du Pays de Galles, où il vit désormais. La galerie Sit Down présente jusqu’au 20 décembre 2015 quelques images de sa série “Cynefin“ : “ce lieu familier“.
Comme le battement d’un oeil, Tom Wood ne s’arrête jamais de photographier. Ce jour-là, vous ne le connaissez pas, vous ne l’avez pas encore remarqué qu’il vous photographie déjà depuis un moment, avec ceux qui vous entourent. Lorsque, entre deux grappes d’images qu’il saisit sans en avoir l’air – le bras en l’air, l’oeil vérifiant rapidement l’écran – vous surprenez son regard, il bredouille quelques mots et vous fixe en souriant. Comme si ce sourire énigmatique, mi-poli miespiègle, était la meilleure réponse à la question “pourquoi photographier ?“ (suite…)
Plus que jamais, le projet Samaritaine est lié à la photographie. Après avoir commandé un état des lieux explorant les onze niveaux du bâtiment avant transformation, alors que la reconstitution des archives visuelles se poursuit, nous continuons à solliciter les photographes pour que leur regard nous révèle des interprétations inusitées des lieux, pour qu’ils éclairent un monument mythique de Paris inaccessible depuis déjà dix ans.
Après avoir demandé à cinq jeunes français et cinq jeunes étrangers de nous donner leur vision du lieu, ce sont dix étudiants et anciens élèves de l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts qui, l’an passé, avaient décliné les grandes directions de la photographie contemporaine.
Au moment où le chantier – qui sera suivi et chroniqué par différents photographes – prend enfin toute sa mesure nous avons choisi pour cette troisième étape de réunir – ou confronter – des écritures aussi affirmées que différentes. (suite…)
C’est par le marbre que François Chaillou est venu à la matière. Formé à Carrare, il étudie la sculpture là où la pierre s’extrait, en parallèle d’un cursus aux beaux-arts. Trois enseignements seront pour lui décisifs. D’abord, la hardiesse de la sculpture : travailler la pierre, c’est tailler dans les montagnes et s’engager dans le bloc. Ensuite, sa délicatesse : aux coups succède le polissage, long et concentré, qui raffine le corps-à-corps. Enfin, sa biologie : d’origine sédimentaire, le marbre est parfois tenu pour une matière vivante, recelant dans sa froideur la vitalité de la chair. (suite…)
Dans les moeurs du collectif Tendance Floue, il est souvent question de réunion, de débat, d’action, de mise en oeuvre collective, de commande, d’exposition, de publication et, à chaque fois, de célébration ! Leur 25ème anniversaire, qu’ils inaugurent ici et qui se poursuivra tout au long de 2016, est une de ces occasions en or leur offrant la possibilité d’inviter leur public à partager de nouvelles propositions, sous les hospices d’une maturité photographique tant du collectif que de chaque artiste qui le compose.
D’études religieuses interrogeant le mysticisme jusqu’à la photographie, il n’y eut qu’un pas à franchir pour la jeune Sabine Mirlesse qui, convaincue que la photographie s’inscrivait dans le champ de l’art, vécut trois mois, après un master en photographie à New York à Parsons the New School for Design, en résidence d’art en Islande, terre mystérieuse, énigmatique et magique : là où la terre respire, bouge, tremble, où les secousses sismiques se multiplient, où les volcans éructent leur lave brûlante, où le sol bouillonne, se creuse et se gonfle – terre de vie et de mort.
Là où les contes et légendes nourrissent une culture, là enfin où le lien entre un peuple et son sol s’avère d’une extraordinaire intensité. (suite…)
L’art n’est qu’une illusion.
L’artiste crée des images et non la réalité : aussi réussie soit-elle, une imitation de la nature n’est qu’une image de celle-ci.
Pour Cesar del Valle, croire que l’on peut rendre le réel via les artifices d’une création artistique est pour le moins illusoire. Un objet dessiné n’existe pas en dehors de sa nature première de dessin. Il n’a pas de réalité propre. Il ne s’agit que d’une création intellectuelle.
Pourtant souvent, au grè d’une lecture, devant un film ou un tableau, nous nous laissons aller à rêver. Nous voulons croire, croire que peut-être cette image aurait une autre réalité, et pour un temps nous acceptons de bannir les barrières physiques qui rendent l’imaginaire et le réel incompatibles.
Mais l’artiste de nous rappeler sèchement notre égarement. (suite…)