Pour sa sixième édition, le Festival du Regard vous propose une plongée au cœur de l’intime et de l’autofiction. Après avoir exploré la période transitoire de l’adolescence (en 2018), les différentes façons d’« habiter » le monde (en 2019) ou de le parcourir avec curiosité (Voyages extra-ordinaires, 2020), nous vous emmenons aujourd’hui dans l’intimité de photographes-auteurs qui ont pris leur propre vie pour fil conducteur de leur travailPour sa sixième édition, le Festival du Regard vous propose une plongée au cœur de l’intime et de l’autofiction. Après avoir exploré la période transitoire de l’adolescence (en 2018), les différentes façons d’« habiter » le monde (en 2019) ou de le parcourir avec curiosité (Voyages extra-ordinaires, 2020), nous vous emmenons aujourd’hui dans l’intimité de photographes-auteurs qui ont pris leur propre vie pour fil conducteur de leur travail…
L’approche autobiographique a toujours existé dans la photographie, mais elle est longtemps restée à l’arrière-plan… Si on peut considérer que la première photo de l’intime est, en 1840, l’incroyable autoportrait d’Hippolyte Bayard en noyé (protestant ainsi contre l’oubli par l’Etat de sa propre invention de la photographie), pendant longtemps la mission du photographe était de montrer le monde extérieur, d’être un témoin, un observateur, un reporter. Bien sûr on peut retrouver des traces d’intimité chez Edward Weston, dès 1935, quand il réalise des nus de Charis Wilson qui deviendra sa compagne. Mais celui qui va définitivement ancrer l’intime dans une photographie de témoignage, c’est Robert Frank dans «Les Américains», qui se clôt par une photo prise au petit matin sur une route où l’on devine sa famille endormie dans un véhicule mal garé le long de la route. Quelques figures titulaires ont définitivement fait basculer la photographie dans l’autobiographie et l’intime. On peut citer Nan Goldin et sa «ballade de la dépendance sexuelle» (1986), toute l’école japonaise issue de Nobuyoshi Araki et de Daido Moriyama, ainsi que la filiation nordique qui s’ouvre avec Christer Strömholm, s’épanouit avec Anders Petersen et se multiplie au XXIème siècle avec JH Engstrom, Jacob Aue Sobol et beaucoup d’autres…
En France, l’arrivée quasi simultanée dans le sillage de Christian Caujolle de l’agence Vu d’Antoine d’Agata et de Michael Ackerman, à la fin des années 1990, ancrent définitivement le corps du photographe comme étant un élément constitutif du travail artistique. Désormais, le photographe est autant derrière l’appareil que devant, dans une sorte de dédoublement de personnalité. En accueillant dans cette édition quelques photographies emblématiques de Michael Ackerman et un film sur Antoine d’Agata, nous mettons justement en valeur ce basculement où l’intimité du photographe dialogue en prise directe avec le monde extérieur. Cette façon d’affirmer le « je » (que l’on pourrait prendre pour une forme d’égotisme quand il est mal géré) va aussi permettre de renouveler et de revivifier la photographie créative. En se rapprochant d’une forme de narration, les «mises en scènes» de l’intime vont devenir le pendant photographique de ce que l’on nomme en littérature « l’autofiction ». Ce genre mal défini nous a paru intéressant à mettre en parallèle avec la notion de l’intime photographique. Comment se dévoiler sans aller trop loin ? Comment faire de sa propre personne un personnage « extérieur » ? Comment éviter le piège de l’autocongratulation ou de l’autoflagellation ? Comment trouver la bonne distance quand on est à la fois l’auteur et l’acteur, le sujet et l’objet ? Mais surtout comment mêler fiction et réalité dans ce qui est à la fois une création artistique et un témoignage documentaire ?
Sylvie Hugues et Mathilde Terraube
Directrices artistiques du Festival du Regard
• Alberto Garcia Alix : De donde no se vuelve
• Jen Davis : Eleven Years, et sa suite Stephen and I
• Marc Riboud et Catherine Chaine : Clémence
• Patrick Taberna : Autres journées
• Eva Rubinstein : Elégies
• Lolita Bourdet : Plamondon
• Marilia Destot : La Promesse
• Sylvia Ney : De l’autre côté de l’eau
• Patrick Cockpit : Franco et moi
• Franck Landron : Ex Time
• Kourtney Roy : Enter as Fiction
• Robert Doisneau : Meilleurs vœux
• Deanna Dikeman : Leaving and waving
• L’intime et l’autofiction vus par : Hippolyte Bayard, Araki, Lucienne Bloch, Miroslav Tichý, Ralph Eugene Meatyard, Michael Ackerman et une sélection de tirages du XIXème.
• Projections des court-métrages de Kourtney Roy et des films documentaires de Franck Landron (Limite(s) d’Antoine d’Agata et Un flirt photographique sur l’œuvre de Claude Nori)
• Exposition Bambino (le Festival du Regard à destination du jeune public)