Pour sa septième édition, le Festival du Regard vous plonge au cœur de la Nuit photographique. Véritable défi pour ce medium qui, par définition, se nourrit de lumière. Après les thèmes «Adolescences», «Habiter », «Voyages extra-ordinaires» et «lntime et Autofictions», voici «Bonjour la Nuit !» qui vous emmène dans les univers nocturnes de vingt photographes.
Parmi les plus connus, Anders Petersen. Le festival a l’honneur de présenter des tirages inédits du célèbre Café Lehmitz. Fasciné par le quartier rouge de Hambourg, le photographe suédois va s’immerger dans le huis-clos d’un petit bar du port et tirer le portrait de ses habitués. Cette série produite en 1967 va propulser l’artiste sur la scène photographique internationale. C’est avec «House Hunting», que Todd Hido s’est fait connaître en 2001. Lui qui a su saisir l’ambiance inquiétante de la nuit américaine en photographiant de simples pavillons éclairés et silencieux…
Une ambiance mystérieuse se dégage aussi des tableaux de Juliette Agnel. Dans ses grands formats se déploient, majestueuses, les plus belles cités antiques du Soudan sous un ciel constellé d’étoiles. Troublante beauté que celles des pierres laissées-là depuis la fin du règne du pharaon Taharqa (vers 600 ans avant notre ère). C’est également sous des voutes célestes scintillantes que Thierry Cohen a figé pour toujours les mégapoles de Tokyo, Shanghai ou Rio, sauf que les cieux que nous voyons sont faux. L’éclairage urbain les a rendus invisibles… Par un tour de passe-passe numérique, le photographe français les fait réapparaître afin de nous faire prendre conscience de ce problème majeur nommé pollution lumineuse. Les étoiles devaient être bien visibles ce soir de novembre 1965, lorsqu’une panne de courant générale plongea brutalement la ville de New York dans une quasi totale obscurité. Le photographe de Magnum, René Burri, équipé de huit rouleaux de pellicule, a témoigné de cette expérience exceptionnelle dans une des plus grandes villes du monde où on avance comme dans un rêve halluciné… L’absence d’électricité, c’est le lot quotidien d’un milliard d’habitants sur terre. Rubén Salgado Escudero met en scène des habitants des quatre coins du globe, dont la vie a été améliorée grâce à des panneaux solaires portatifs. Quant au Cambodgien, Philong Sovan, il utilise le phare de sa motocyclette pour photographier la vie nocturne et bouillonnante de Phnom Penh.
Il arrive que la nuit devienne féérie lorsque les aurores boréales sont de la partie. Dans Arctic Stories, la Russe Evgenia Arbugaeva nous fait découvrir l’extraordinaire magie des nuits polaires. Festive aussi, dans les photographies de Ronan Guillou qui a relevé le défi de la Carte blanche lancée par la Communauté d’Agglomération de Cergy Pontoise en nous dévoilant les coulisses du spectacle flamboyant, Carmen Street, le chef d’œuvre du compositeur Georges Bizet d’après la nouvelle de Prosper Mérimée. A l’approche de la fin d’année, la nuit se pare de ses plus beaux habits de lumière, comme le montrent les images de Laure Vasconi réalisées à Los Angeles. Là-bas, la tradition des décorations de Noël est une affaire sérieuse. Tout est dans la démesure, c’est à celui qui fera scintiller le plus d’ampoules ! Toujours sur le continent américain, Céline Croze nous emmène au Vénézuela. La photographe nous fait rencontrer les barons de la nuit de Caracas où elle séjourne pendant le tournage d’un film. Un univers de couleurs sourdes et de violence, qu’elle restitue avec force dans la série «Siempre que», présentée pour la première fois dans un festival. C’est également une première pour Françoise Evenou, et ses «Reinas del Bosque», portraits dignes et altiers des travailleuses du plaisir en périphérie de Paris. Enchaînement parfait avec la nuit sulfureuse vue par l’Américaine Merry Alpern qui, en 1993, va épingler les mœurs interlopes des traders de Wall Street dans un peep-show clandestin de New-York. Autre série culte qui interroge sur notre place de spectateur/voyeur : «The Park», du Japonais Kohei Yoshiyuki, décédé cette année, à qui le festival rend hommage.
La nuit, au sens métaphorique, le Slovène Evgen Bavcar y est plongé depuis l’age de 11 ans. Aveugle, le photographe réussi à saisir des scènes étranges et envoutantes…
Le Festival du Regard n’oublie pas les pionniers du XIXe- début XXe siècle : le duo Loewy & Puiseux et leur collecte de milliers de clichés de la lune, l’œuvre de celui qui inventa Paris la nuit, l’immense Brassaï, ainsi que Léon Gimpel et ses autochromes des grands magasins illuminés réalisés en 1925, exposés dans un centre commercial… La boucle est bouclée !
Notre collaboration avec l’Ecole Nationale Supérieure d’Arts de Paris-Cergy initiée l’année dernière se poursuit. Il s’est concrétisée par un appel à projet lancé au printemps 2021 permettant à trois étudiants d’exposer pour la première fois : Maria Abdullaeva, Nadezhda Ermakhova et Alexis Boucher.
Cette année, une nouveauté, le lancement du Projet Erigere consistant en des ateliers photographiques menés avec les résidents de cet acteur majeur du logement social.
LES PHOTOGRAPHES
• Juliette Agnel : Taharqa, de nuit
• Merry Alpern : Dirty Windows
• Evgenia Arbugaeva : Arctic Stories
• Evgen Bavcar : L’Inaccessible étoile
• René Burri : Blackout New York
• Celine Croze : Siempre que…
• Thierry Cohen : Villes éteintes
• Françoise Evenou : Las Reinas del Bosque
• Todd Hido : House hunting
• Anders Petersen : Stockholm – Café Lehmitz
• Ruben Salgado : Solar Portrait
• Philong Sovan : City Night Light
• Laure Vasconi : Merry Christmas
• Kohei Yoshiyuki : The Park
• La nuit vue par… : Brassaï, Léon Gimpel, Loewy & Puiseux et une sélection de photographies du XIXe siècle, début XXe.
• Exposition des trois lauréats de l’appel à projets lancé avec l’Ecole Nationale Supérieure des Arts de Paris-Cergy (ENSAPC) sur le thème de la nuit : Maria Abdullaeva, Nadezhda Ermakhovaet Alexis Boucher.
• Expositions des ateliers photo menés avec Malik Dieng pour ERIGERE, l’Ecole Talentiel de Vauréal et l’association Wake up Café.
• Projections des films autour de la Nuit réalisés par Céline Croze, Véronique Bourlon et Rima Samman
• Exposition autour du spectacle Carmen Street – Carte Blanche au photographe Ronan Guillou.
• Exposition Bambino (le Festival du Regard à destination du jeune public)