À ImageSingulières, nous avons l’habitude de prendre le pouls du monde qui nous entoure. Le moins que l’on puisse dire c’est que ce monde-là ne va pas aussi bien que nous pourrions l’espérer. Pandémie, inflation, conflits sociaux, crise climatique, guerre à nos portes, peu de choses nous sont épargnées et le festival lui-même ne peut se tenir à l’écart de tout cela.
L’économie de la culture nous oblige chaque année à inventer une nouvelle histoire pour que notre événement perdure. Nous nous devons de refléter le monde en images sans omettre de rester fidèles à nos fondamentaux : l’ouverture à tous les publics en maintenant la gratuité, et la convivialité qui est notre seconde nature.
Nous avons ainsi décidé, pour 2023, de nous réapproprier le centre-ville de Sète en replaçant le cœur du festival dans l’espace que nous animons tout au long de l’année, le Centre photographique documentaire, et en installant nos soirées de projections face à la mer au Fort Saint Pierre pour le week-end d’ouverture. La durée des expositions sera aussi rallongée.
Cette année, la résidence a été confiée à Lorenzo Castore, une figure marquante du nouveau documentaire, qui va nous livrer, à la salle Tarbouriech, une version sensible du portrait de Sète que nous tentons de construire année après année. Ce sera le seizième livre de la collection, toujours co-édité avec Le Bec en l’air.
Felipe Fittipaldi, lauréat du Grand Prix ISEM 2022 (ImageSingulières-ETPA-Mediapart), habitera jusque fin septembre les jardins du Musée Paul Valéry avec Eustasy, une fresque épique sur la montée des eaux le long de la côte atlantique du Brésil.
Une grande rétrospective de Michel Vanden Eeckhoudt a été montrée récemment au musée de la photographie de Charleroi. C’est ce travail-là que nous avons choisi pour la Chapelle du Quartier Haut afin de rendre hommage à ce photographe majeur, en prise avec le réel et ardent défenseur du noir et blanc.
Au Centre photographique documentaire, nous présenterons, jusqu’à début août, six photographes de la grande commande sur la France de la BNF, initiée par le Ministère de la Culture : Valérie Couteron, Pierre Faure, Stéphanie Lacombe, Richard Pak, Kourtney Roy et Frédéric Stucin avec une sélection de leurs projets respectifs. Cette commande publique passée à deux cents photographes est une radiographie du pays au sortir de la pandémie et une riche contribution aux archives de la bibliothèque.
Rodrigo Gomez Rovira, chilien mais aussi un peu français, a vécu le coup d’État de Pinochet il y a tout juste cinquante ans, lorsqu’il était jeune garçon. Il se souvient de ce déracinement qui l’a amené en France et qu’il nous conte à sa manière, avec ses archives et celles d’autres acteurs de ce drame, ce pan de l’histoire de son pays. Ce sera au Cyclo, un nouveau lieu pour nous, rien d’autre qu’un ancien studio photographique.
Depuis deux ans, nous investissons également deux espaces hors de la ville. Au Jardin Antique Méditerranéen de Balaruc-les-Bains, Natela Grigalashvili, qui vient de Géorgie, proposera sa série Village of the Mice, un récit sur les traces de son enfance dans son village natal de montagne. Une chronique noir et blanc tout en souvenirs précieux.
Au Musée Ethnographique de l’Étang de Thau à Bouzigues, Éric Garault reviendra sur ses pérégrinations chez les petits paysans du Minas Gerais, région peu connue du Brésil où la vie s’organise autour de l’agriculture et de paysages somptueux.
Le Centre photographique documentaire sera le cœur battant du week-end d’ouverture du festival, avec son salon des éditeurs, ses rencontres, sa fête d’ouverture… Sur rue, en façade, nous célébrerons Ronan Guillou, un ami du festival disparu récemment. American Narratives, la fresque qu’il nous laisse en héritage, va nous porter tout au long de notre événement.
Gilles FAVIER, directeur artistique & Valérie LAQUITTANT, directrice