Photographies de Heinrich Hoffmann
Heinrich Hoffmann (1885-1957) est un photographe allemand, proche d’Adolf Hitler, ayant exercé sous le IIIe Reich. Comment cet homme, à travers son activité de photographe, a-t-il joué un rôle de premier plan dans la propagande du régime nazi ? C’est tout l’enjeu de l’exposition, « Hitler en image, les ressorts de la propagande, 1922-1945. Photographies de Heinrich Hoffmann », présentée au Pavillon Populaire, à laquelle le Mémorial de la Shoah a apporté son soutien, que de démontrer en quoi les photographies d’Hoffmann et ses mises en scène d’Hitler ont été des outils au service de l’idéologie nazie.
Issu de la petite bourgeoisie, Hoffmann apprend son métier à Londres en 1907-1908, auprès d’un photographe portraitiste anglais renommé, Emil Otto Hoppé. De retour à Munich juste avant la Première Guerre mondiale, il fonde son propre studio tout en pratiquant le reportage. En avril 1920, il découvre et adhère au parti nazi. En octobre 1922, il prétend avoir été contacté par une agence photographique américaine lui offrant 100 dollars pour une photo d’Adolf Hitler. Par l’intermédiaire du rédacteur en chef du Völkischer Beobachter, le quotidien nazi, il prend contact avec Hitler mais celui-ci refuse absolument qu’on le photographie. Quand Hoffmann tente pour la première fois de le prendre en photo à l’issue d’un meeting, son appareil est saisi et le négatif est détruit. Ce n’est que lorsque le photographe indépendant Georg Pahl réussit à le photographier à Nuremberg qu’Hitler accepte enfin de poser pour Hoffmann et le désigne alors «photographe officiel».
Heinrich Hoffmann fut non seulement le photographe d’Hitler de 1922 à 1945 mais il fut surtout un de ceux qui participèrent à un processus d’apprentissage aboutissant in fine à une propagande par l’image particulièrement élaborée. Leur proximité a conduit à la production de plusieurs milliers de portraits du Führer. La Bayerische Staatsbibliothek de Munich, notamment, en compte plus de 12 000. La quasi-totalité des images historiques qui figurent aujourd’hui dans les manuels d’histoire sont dues à Heinrich Hoffmann, de la poignée de mains avec le maréchal Pétain à Montoire à la destruction de la chancellerie à Berlin. Ses photographies, Hoffmann les proposait non seulement à la presse allemande et internationale mais il les déclinait aussi sous la forme de cartes postales, de posters et d’albums illustrés, dont certains furent tirés à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires.
C’est ce corpus considérable, que couvre les 23 ans de la vie politique d’Hitler, qu’Alain Sayag, entend analyser dans l’exposition du Pavillon Populaire. Quels ont été les ressorts de la propagande nazie et comment Heinrich Hoffmann y a-t-il contribué, par son travail de photographe ?
Ce décryptage critique des photographies d’Hoffmann s’accompagne de textes de Johann Chapoutot et de Denis Peschanski, qui apporteront leur point de vue d’historiens du nazisme internationalement reconnus, sur la mise en place, par l’image, des mythologies entourant la personnalité et d’Adolf Hitler, et sur le rôle d’amplificateur qu’a pu jouer la photographie, dans la mise en scène du mythe du Führer.